mardi 18 juillet 2017

AINSI VA LA SCÈNE

Carmen 2017 à Aix : de la tragédie d'une femme libre au vaudeville d'un homme impuissant.

La   Carmen "de"  Calixto Bleito :  voie de garage pour la Mercedes, non l'amie de Frasquita, mais la berline en panne sur scène. Heureusement, il y a une cabine téléphonique pour appeler un garagiste.

     Je concède a un artiste metteur en scène tous les droits sur une œuvre : c'est sa liberté. Mais que certains critiques osent parler de "renouvellement" de l'œuvre me fait sourire : le renouvellement ne peut se faire que par une lecture nouvelle interne, intrinsèque, de l'œuvre qui, elle, demeure immuable si c'est un chef-d'œuvre, comme ici. Or, ce type de mises en scène, fuyant la profondeur intime de l'œuvre, dans l'incapacité de l'analyser sérieusement, ne sont qu'un placage arbitraire, extérieur. Bref, un déguisement épisodique, épidermique, et non une réelle étude nouvelle. C'est un triste symptôme de la pauvreté superficielle du temps : on prend l'écorce pour la substance.

lundi 23 mai 2011

BILAN CULTUREL


BILAN CULTUREL

On sait que la langue française n’est pas le fort du Président de la République, ni sa littérature, son faible. On connaît son aversion pour La Princesse de Clèves, ce chef-d’œuvre littéraire. Or, voici qu’aujourd’hui, par son digne ministre, il fait classer la corrida, espagnole, au « patrimoine culturel immatériel » de la France. A l’orée de la campagne présidentielle, nul n’ignore désormais sa hiérarchie culturelle et son bilan culturel.

jeudi 8 juillet 2010

LE BLUES DES BLEUS


LE BLUES DES BLEUS

Les Bleus ont des bleus à l’âme. Tout est perdu, même l’honneur, mais heureusement leur corps est sauf : ils ont su l’épargner. Quitte à ne pas économiser leurs salaires : ils renoncent à leurs primes, mais gardent toujours les honneurs du « prime time ». N’a-t-on pas vu le retour des zéros sur toutes les télés, et leur représentant avec des escortes de gardes du corps, des renforts de police dignes de chefs d’état, être reçus de toute urgence, de leur avion jaune canari direct chez le Président de la République qui a même déplacé son précieux et précis agenda pour recevoir Thierry Henry ?
En ce jour de grève massive, rien n’a transpiré des secrets capitaux qu’ont pu échanger le chef de l’état et l’un de ceux qui n’ont pas fait suer ni mouillé leur maillot. On en est acculé aux supputations. Avançons-en une : étant donné que les membres de l’équipe de France ont été traités de « voyous milliardaires », de  vulgaires « caïds de cité » « sous-éduqués », parions que Nicolas Sarkozy, pour panser leurs blessures et pallier cela, leur a conseillé de lire d’urgence La Princesss de Clèves.

samedi 2 août 2008

MICHELITO MATADOR ('TUEUR')

MICHELITO ET LA CORRIDA

ENFANT TUEUR (‘Matador’)


Triste signe de notre époque : faire argent de tout. Les uns vendent leur corps, les autres, leur peau, en la risquant : pour le plaisir voluptueux des nantis qui peuvent se l'offrir, protégés sur leurs gradins. Là, ce sont des parents qui offrent leur fils en pâture aux spectateurs dans un spectacle simulacre de mort ici, mais font gloire que leur rejeton ait à son palmarès la mort de 60 bêtes en Amérique latine. Combien ont-il empoché en vendant sinon le corps, la vie de leur fils ?
Valentin, un enfant bouleverse toute la France, poignardé et, là, c’est un enfant poignardeur (ou qui risque de l’être par le toro) dont on offre le spectacle, contre argent, à un public qui paie pour voir couler le sang et acclamer la mort : VIVA LA MUERTE ! Vive la mort !
Le ministère de l’ « éducation » est complice de cours de corrida dispensés en tiers libre « culturel » à des gamins auxquels on apprend à manier une épée pour tuer une vie alors qu’ils ne savent pas encore tenir droit la plume.
Mettre au monde un enfant, c’est affirmer la vie, la nature ; l’associer à la mort, le faire exécuteur de mort, en faire un « matador », qui signifie «tueur » , est un acte indigne et dénaturé.


vendredi 25 juillet 2008

PRÉSIDENT ANXIOGÈNE

PRÉSIDENT ANXIOGÈNE

Deux mots, depuis un an, hantent la presse qui rend compte presque quotidiennement des faits et gestes du Président depuis son élection : polémique, provocation, dont il semble avoir fait une spécialité ou une politique. Où qu’il passe, celui que l’on nomme partout « l’omniprésident » laisse des traces, souvent cuisantes.
Pour ne retenir que des termes de deux grands journaux, le Canard et le Monde, celui qui est supposé représenter tous les Français est : hyperénervé, agacé, emporté, excédé, éruptif, enfle de colère, entretient la pression (Le Canard). Il s’en prend à l’Insee, organisme officiel qu’il discrédite, « multiplie les attaques contre M. Mandelson », prend des initiatives que ce dernier désavoue publiquement (Le Monde). Les chômeurs, les marins, les enseignants, les fonctionnaires, les syndicats, les grévistes, les militaires, « pas professionnels », ses ministres, ses collaborateurs, sont tour à tour épinglés, traités d’ « incapables », cible de sarcasmes, d’interpellations et de désaveux publics, quand il n’insulte pas, à la surprise universelle, un mécontent. Bref, le président fulmine, fustige, « blesse », rien n’échappe à sa voracité ou férocité critique : de la littérature (La Princesse de Clèves ), du théâtre (Comédie-française), de la télévision et ses programmes à Bruxelles, de la mémoire historique des enfants, et dit-on aussi de foot, il paraît tout vouloir régenter. Il semble cultiver l’art de faire une affaire de ce qui ne l’est pas, de jeter de l’huile sur le feu, du vinaigre où cela cuit, comme à propos de ces grèves qui seraient devenues invisibles grâce à sa baguette magique : « l’essentiel pour lui est d’occuper le devant de la scène » (le Monde). Au risque de confondre action et agitation, geste et gesticulation.
Ses réformes, sans doute nécessaires pour certaines, mais douloureuses, sont présentées apparemment moins comme un intérêt de réussite collective que comme le gain d’une victoire personnelle de son volontarisme imposé de force à tout le monde : ce n’est plus un pour tous mais plutôt un contre tous. Il ne lui suffit pas de vaincre, il veut écraser, humilier, comme s’il y cherchait la satisfaction de quelque revanche secrète.
On laissera aux psychanalystes quelque interprétation pour s’étonner que ce Président « Famillionnaire », « mélange d'arrogance et de familiarité dont [il] accable ses concitoyens depuis un an» (Le Monde) s’étonne à FR3 du manque de respect qu’il inspire. Car, la seule règle, pour être respecté, est d’être respectable et respectueux. Or, loin de rassurer les Français, Monsieur Sarkozy sème le trouble, la confusion, l’incertitude, l’angoisse. Plus qu’un « famillionnaire » sans gêne comme il est qualifé dans le Monde, c’est un Président anxiogène.

lundi 3 décembre 2007

vendredi 30 novembre 2007

Scène de la vie marseillaise

Au restaurant, tard, après le spectacle, vendredi. Nous faisons traîner le dessert, bavardant avec le patron, attendant que le Cours Julien se vide un peu de voitures pour pouvoir y garer pour la nuit celle de mon amie, présentement quelque part loin sur la Plaine, qui attend le marché de demain. À la table à côté, un couple bien mis, entre dans la conversation :
"Vous étiez au théâtre, on vous a vus, vous avez aimé?
- Oui, mais un peu long. Bon, mais ça nous permet au moins d’attendre un peu tranquillement pour trouver une place…
- Ah, oui ! C’est galère ! On peut plus se garer à Marseille ! Parkings pleins, hors de prix, voitures sur les trottoirs… Les gens, y’ sont incroyables, le règne de l’incivilité ! Tenez, nous, on a un garage, et on a toujours des voitures garées devant.
- Ce ne sont pas les voitures qui sont garées devant, dis-je en badinant, c’est votre garage qui est garé derrière.
-  C’est ça ! Alors, quand on vient au spectacle, on part tôt dès qu’on peut pour pouvoir se garer au centre sans payer le parking ; on se fait un petit gueuleton chic et on rentre tard pour trouver la voie libre. Mais on a fini, nous. Vous cherchez une place? on vous laisse la nôtre !
- Oh, oui ! dit mon amie qui tombe de sommeil.
- On est garés juste en face."
Je regarde par la vitre.
"Mais où? je n’en vois pas…
- Mais oui, là, juste là,  la place des z’handicapés."

Benito Pelegrín

mercredi 9 mai 2007

LA VICTOIRE DE SÉGOLÈNE ROYAL
(Appel pour un comité de soutien)

Intellectuels, écrivains, artistes et citoyens, les signataires de cet appel entendent s’élever contre la présentation pernicieusement défaitiste qu’on tend à faire, qu’on entend répéter, de la défaite électorale de Ségolène Royal.
Dans une démocratie, perdre une élection, ce n’est pas perdre la face. Quand on s’est battu dans l’honneur, la vérité, à la fois à l’intérieur de son propre camp et à l’extérieur, il y a des défaites plus glorieuses que certaines victoires et l’Histoire en pourra juger.
Si ses 47% ne font pas une victoire, ce n’est pas une déroute : c’est une défaite électorale, pas un échec, ni encore moins une condamnation de la candidate ni de son programme, approuvé par près de la moitié du pays.
Nous avons soutenu sa campagne, nous avons vibré d’espoir de la France réaliste mais juste et généreuse qu’elle proposait : nous ne laisserons pas obscurcir son lumineux message.
Nous tenons, au contraire, à mettre en lumière ce fait si aveuglant qu’on semble ne pas le voir : pour la première fois dans l’Histoire de France, pays vieilli et très en retard sur l’évolution du monde et des mœurs, une femme arrive aux portes du pouvoir. Oui, seulement aux portes. Mais, si elle a été bassement rabaissée, ridiculisée, insultée, et même par des femmes, en tant que femme, un fait s’impose : au soir du premier tour, on n’a plus parlé de la femme, mais de la candidate, bref, de l’individu, par-delà les sexes. Plus personne n’a invoqué son sexe pour évoquer sa capacité et la possibilité pour elle d’exercer la fonction présidentielle. Plus qu’une victoire, c’est une révolution. Ségolène Royal a fait franchir à la France un pas irréversible.
C’est pourquoi c’est en elle, qui a porté l’espérance de près de la moitié du pays, que nous voyons la force légitime capable de régénérer et renouveler la gauche. Nous venons de perdre une bataille, nous ne nous laisserons pas voler cet espoir.

7 mai 2007